Un arrêté du 9 avril 2021 relatif à la modification de la signalisation routière donne une base légale aux feux tricolores « récompense » qui permettent de réguler la vitesse des véhicules et de tenir compte du comportement des usagers pour passer au vert… ou pas.
Un vrai cadre légal
L'utilisation de feux asservis à la vitesse était devenue une pratique courante de nombreuses communes ces dernières années.
Si l'objectif était louable, réduire la vitesse et protéger les piétons, l'initiative était pourtant dépourvue de base légale. Cette utilisation des feux n'était en effet pas conforme à la réglementation. Les textes accordaient aux feux tricolores uniquement une fonction d'organisation de la circulation et de gestion des conflits entre différents usagers. Le rôle de modération de la vitesse n'était pas prévu. Ainsi, utiliser des feux pour réduire la vitesse revenait donc à faire une mauvaise utilisation des feux.
Or, un usage non conforme de la signalisation est de nature à engager la responsabilité des collectivités et la responsabilité pénale de leurs représentants en cas d'accident corporel de la circulation. Le Ministère de l'Intérieur l'avait d'ailleurs rappelé en répondant aux questions écrites du Sénat et de l'Assemblée Nationale sur le sujet. C'est donc tout logiquement qu'il avait invité les collectivités ayant implanté de tels dispositifs à ne plus les utiliser ou à leur redonner un usage de feux de circulation classiques.
Si le Ministère de l'Intérieur avait noté l'obstacle juridique à l'installation de ces feux, il n'en avait pas pour autant écarté l'intérêt sur le plan de la sécurité routière. C'est dans ce contexte, que des expérimentations « officielles » ont été autorisées notamment à Vieux-Mesnil dans le Nord pour la dernière en date. Ces expérimentations ont nourri les réflexions d'un groupe de travail mis en place (CEREMA, SER, collectivités) qui a confirmé la pertinence de ce dispositif pour la sécurité routière et l'intérêt de l'autoriser.
L'arrêté qui vient d'être publié modifie l'Arrêté du 24 novembre 1967 relatif à la signalisation des routes et autoroutes etl'Instruction interministérielle sur la signalisation routière (IISR). Un vrai cadre légal est maintenant posé et les modalités sont précisées.
Oui aux feux « récompense », toujours non aux feux « sanction »
Le principe retenu par l'arrêté est celui du feu « récompense ». Le feu de circulation est rouge au repos. Il passe au vert quand il détecte un ou des véhicules en approche qui circulent en respectant la limitation de vitesse. Quand plus aucun véhicule n'est détecté, le signal repasse au repos au rouge.
Le système dit « sanction » en revanche n'est pas retenu. Certaines villes l'utilisent pour faire passer le feu au rouge quand un usager de la route ne respecte pas la limitation de vitesse. Son usage n'est pas conforme aux textes, même modifiés, en vigueur. Ces feux "sanction" restent ainsi interdits.
Un usage limité à certains endroits
Le texte prévoit que lorsqu'un feu est utilisé pour réguler la vitesse des véhicules en approche, le signal est obligatoirement :
- implanté en agglomération ;
- en section courante, en dehors des passages pour piétons, des intersections ;
- et à l'écart du panneau d'entrée d'agglomération.
En pratique, il faut en effet que la "récompense" puisse être effective. Ce type de feux doit ainsi être utilisé à des endroits où il n'y a pas de conflits ou de flux avec d'autres usagers à gérer. C'est pourquoi l'implantation du dispositif est exclue aux intersections et aux passages piétons.
Un outil pédagogique parmi d'autres
Les feux dits "récompense" sont un outil de plus pour une circulation plus fluide et plus sûre. Ils viennent compléter d'autres dispositifs qui existent déjà et qui permettent, concernant les feux, de faire de la micro-régulation notamment aux intersections. Dans ces cas, il n'y a pas de notion de « récompense » ou de prise en compte de comportement.
Moins de feux rouges « grillés », une circulation plus fluide, plus apaisée, donc plus sûre et plus vertueuse (consommation d'énergie, bruit) sont les principaux bénéfices de cette signalisation « micro-régulée » identifiés par le CEREMA.
Références :
Pour aller plus loin :
- Cerema – Feux et régulation (infographie)
- Feux asservis à la vitesse – CEREMA (Evaluation Celle-L'Evescaut, Carbonne, Toulouse)
- lnstruction Interministérielle sur la Signalisation Routière du 22 octobre 1963 modifiée
- Arrêté du 24 novembre 1967 relatif à la signalisation des routes et autoroutes